La chaleur assommante et surtout les piqûres de moustiques-tigres ont un peu gâché mon séjour dans ma ville natale. Heureusement que j'ai pu ensuite me reposer comme il faut en Bavière !
Je n'ai pas eu la force d'aller visiter quoi que ce soit, mais je suis passée par hasard près de l'église
catholique Sainte-Jeanne-d'Arc, rue Grammont. L'édifice est entièrement construit en béton armé, dans l'entre-deux-guerres. C'est tout près du château Valrose et de son
parc, étroitement liés à la présence russe. Je n'ai pas pu faire quelques mètres pour avoir une photo convenable de l'église avec son clocher d'une soixantaine de mètres, alors aller jusqu'à
Valrose... La prochaine fois, peut-être !
Dans cette "meringue", on peut admirer les fresques du Chemin de Croix par Eugène Klémentieff, un
émigré russe comme son nom l'indique. Il était né à Rybinsk en 1901. Je savais que ces fresques existaient, mais je ne les avais jamais vues. C'est chose faite.
"Eugène Klementieff [...] relate dans son journal intime, manuscrit retrouvé après de longues et patientes recherches dans la région parisienne, par mon frère,
président de l'Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Culturel russe en France, qu'un jour, perché tout en haut de son échafaudage, il se rendit compte qu'il était observé dans son travail
par un "petit vieux" à la barbe blanche dont il s'avisa trop tard pour aller s'enquérir de son opinion, qu'il s'agissait d'Henri Matisse en personne [...]"
(Itinéraire russe à Nice, Alain Guerra, éditions Albatros)
Puisque je me baladais en centre-ville, sur l'avenue Jean-Médecin, j'ai décidé d'aller voir à quoi ressemblait aujourd'hui la "villa Georges". Pas grand-chose à se mettre sous la
dent.
Je vous ai déjà parlé de la princesse Catherine Yourievskaïa, née Dolgoroukaïa,
l'épouse morganatique de l'empereur Alexandre II. Après l'assassinat d'Alexandre en 1881, elle a quitté la Russie pour ne plus jamais y revenir. Veuve et solitaire, elle s'est
installée en France. Elle a acheté la villa Sainte-Anne en 1891 (au 10 du boulevard Dubouchage) et l'a rebaptisée "villa Georges". Georges, le saint patron de la
Russie et des Romanov. En 1911, c'est là qu'elle a fêté le cinquantième anniversaire de l'abolition du servage, le grande réforme de son époux. Elle a vécu à Nice jusqu'à sa mort, en 1922.
Selon certaines sources, la villa a subi des transformations, mais conserve un
reste de sa splendeur. Selon d'autres sources, elle a été entièrement détruite. En tout cas, le nom est resté.
Pour finir, une photo qui ne date pas de mon dernier séjour: la tombe de l'écrivain-révolutionnaire Alexandre Herzen (1812-1870) au cimetière de la colline du château, qui surplombe la
mer. Le célèbre proscrit du régime tsariste a vécu
quelques années à Nice, à la fin des années 1840 et au début des années 1850, alors que la ville était italienne et que l'expression "Côte d'Azur" n'existait pas encore.
"J'ai longtemps hésité où m'abriter, où chercher le repos; j'ai choisi Nice, non seulement pour son air doux, pour sa mer, mais encore parce qu'elle n'a aucune
signification ni politique, ni scientifique, ni même artistique. J'avais moins de répugnance pour Nice que pour tout autre endroit et j'en suis content. C'est le paisible refuge où je m'éloigne
du monde, tant que nous n'avons pas besoin l'un de l'autre." (Lettres de France et d'Italie, 10 juillet 1850)
"Долго думая, куда укрыться, где найти отдых, я избрал Ниццу не только за ее кроткий воздух, за ее море -- а за то, что она
не имеет никакого значения -- ни политического, ни ученого, ни даже художественного. Мне менее не хотелось ехать в Ниццу, нежели всюду, и я доволен ею. Это мирная обитель, в которую я отхожу от
мира сего, пока мы не нужны друг другу."
Avec la venue des hivernants, Nice et la Riviera vont vite devenir à la mode et perdre leur caractère paisible !
C'est à Nice qu'Herzen apprend la terrible nouvelle de la mort de sa mère et son fils Kolia dans le naufrage de leur vapeur après une collision non loin des îles d'Hyères, en 1851.
C'est ici aussi, en 1852, que meurt son
épouse. Le gouvernement du Piémont essaye aussi de l'expulser de Nice. Si Herzen quitte ensuite Nice pour Londres, il
reviendra souvent dans cette "zone bénie de l'Europe". Herzen est mort à Paris en 1870 et a eu une tombe
provisoire au Père-Lachaise. Puis, selon sa volonté, ses restes ont été transférés à Nice, où il repose désormais près de sa première épouse Natalia. "Il n'y a pas dans ce monde un cimetière plus beau que cette
montagne" avait écrit un jour Herzen à son inséparable ami Ogariov.