16 octobre 2008
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Icônes et saints d'Orient
Traduit de l'italien par D. Férault
Hazan, 2005
En couverture: détail d'une icône d'un monastère du mont Athos, représentant l'archange Gabriel (XIVe siècle)
Je n'ai pas hésité. Il a suffi que je feuillette le
livre quelques secondes pour comprendre que c'était un trésor. J'en ai immédiatement acheté trois exemplaires: deux pour des copines russes qui travaillent comme guides à Pétersbourg avec des francophones (au musée Russe, il y a des icônes), et un exemplaire
pour moi, bien sûr.
Tout, abolument tout est expliqué et classé d'une manière très claire, d'après les thèmes: l'Ancien Testament, les épisodes de l'Evangile, les fêtes, la Vierge, le Christ, les apôtres, les ermites et saints d'Orient... L'auteur commence par nous expliquer ce qu'est une iconostase, les différences entre les icônes processionnelles, domestiques et théologiques. Pour couronner le tout, on a droit à un glossaire, pratique.
J'avais un peu de mal à m'y retrouver avec tous les types d'icônes, la Mère de Dieu "Qui montre la voie", celle "De la Tendresse", celle "Console ma peine"... le Christ "Oeil qui veille", "En Trône", "Non fait de main d'homme"... mais là, des fiches remettent tout en place. Elles sont accompagnées de reproductions d'excellente qualité et commentées. Tout le monde peut trouver son bonheur: ceux qui n'y connaissent rien et ceux qui ont quelques notions d'iconographie et des Ecritures. Un chapitre est consacré aux saints russes: Boris et Gleb, Serge de Radonège, Cyrille de Bélozersk, Séraphin de Sarov.... Fascinant !
Aidée de ce livre, je vais vous parler de l'icône suivante:

Ecole des Stroganov
"Saint Basile le Bienheureux"
1600
Galerie Trétiakov, Moscou
Il existe une forme particulière de sainteté en Russie: les "fols en Christ" (yourodivy, юродивый). Ces personnes choisissaient une vie de privations et de prière. Alexandre Pouchkine en a immortalisé un, Nikolka, dans Boris Godounov.
Basile (Vassili en russe, 1464 ou 1469-1552), un de ces "fols en Christ", est devenu l'un des saints les plus vénérés de Moscou. Il a été canonisé en 1588. Il errait dans les rues, passait la nuit à la belle étoile, en priant inlassablement, "sans vêtements ni souliers, comme le premier homme dans le paradis terrestre avant le péché" (Vie). Il pouvait s'adresser à tout le monde, du plus humble "moujik" jusqu'au tsar Ivan le Terrible auquel il a osé reprocher sa cruauté. Ses restes reposent dans la truculente cathédrale de la place Rouge que la terre entière connaît.
L'iconographie le représente nu, les paumes et le regard tournés vers le haut dans une attitude de supplication adressée à la Trinité ou à la Mère de Dieu, qui apparaissent dans les nuées ouvertes (ici, la Trinité). La maigreur extrême de Basile met en évidence sa spiritualité. La blancheur de la table de la Trinité se reflète en quelques rehauts de lumière sur ses longs cheveux hirsutes. L'idéal grec de la beauté est totalement absent de cette représentation, où Basile ressemble davantage à un ver de terre qu'à un homme. Et pourtant, il touche le ciel et voit la Trinité !

Photo d'août 2007